Éloge du peuple et de la souplesse
Je viens d’achever la lecture du livre d’Imad Lahoud (Un coupable idéal,
Privé). J’ai relevé, me concernant, 29 mensonges et contre-vérités
flagrantes. Il y en a de minimes et d’énormes. Je n’ai pas envie de
m’étendre. Ce livre est une bouse, mais une bouse intéressante. Pour
déterminer le comportement de certains animaux, les ethnologues travaillent
souvent sur les excréments. C’est le sentiment que j’ai eu en lisant ces
pages. Je comprends que son avocat qui lui ait déconseillé de publier. Je
discerne mieux comment Imad Lahoud a fonctionné et procède pour faire entrer
les faits, souvent têtus, dans son schéma de défense. Et de fuite en avant.
Décrypter la fabrication d’une manipulation revient à trouver la vérité… Si
j’ai fait ce travail de lecture et de réflexion, j’imagine que les juges
l’ont fait aussi. Ses mensonges maintenant sur papier se heurtent au réel.
L’impossible équation de Lahoud doit intégrer ses relations avec moi mais
aussi avec Jean Louis Gergorin et le général Rondot (et ses carnets). Je
sais maintenant à quel point ce type est capable de tout, y compris cracher
dans la main de ceux qui l’ont aidé. Je pense à Rondot mais surtout à
Gergorin, l’ex numéro deux d’Eads. La juxtaposition de nos trois témoignages
rend impossible celui de Lahoud. Tout simplement.
Ce même Gergorin sort aussi un livre (Rapacités, chez Fayard). Si j’en crois
le site de l’Obs, il reprend en les affinant certaines thèses développées
dans mes livres. Enfin une suite… J’y reviendrai après lecture. Je note que
son départ d’Eads a sonné l’air du capharnaüm. Forgeard a été viré. Des
russes sont entrés dans le capital. Airbus s’est fait gratter par Boeing. On
commence à licencier. Et c’est loin d’être fini…
La campagne électorale devrait noyer Eads et cette histoire de corbeau et de
listings dont tout le monde dit qu’elle est compliquée. Je la trouve de plus
en plus lumineuse. Relevons ce paradoxe : plus une affaire est médiatisée,
moins le public est informé. Aujourd’hui que la pression judiciaire est
temporairement retombée et que ces livres sortent, on pourrait plus
facilement trouver la clé et dire les rôles joués par les uns et les autres…
Mais tout le monde, à commencer par les journalistes, semble s’en moquer.
Elle noie tout cette campagne. A commencer par les ardeurs judiciaires et
médiatiques. Le PS devrait pourtant se saisir de cette affaire, surtout
qu’ils n’ont rien à se reprocher. Elle met en exergue plusieurs fléaux : la
censure, les combines de la droite chiraquienne et les rétrocombines de la
droite sarkosyste, l’évasion de capitaux et l’absence de contrôle bancaire,
les paradis fiscaux et les rétrocommissions des frégates… Le peuple, puisque
Ségolène s’en réfère aujourd’hui (« je n’ai de compte à rendre qu’au peuple
» clame-t-elle sans rire), est passionné par ces histoires. Il a envie qu’on
l’informe et qu’on le défende sur ce terrain. Il a horreur qu’on se moque de
lui. Et il a de la mémoire. Le peuple…
La date du concert de soutien est fixée au 17 avril à la Cigale. A
l’affiche, Miossec, Didier Super, Katerine, Moustic, Delépine et les
Grolandais, peut être Bedos et d’autres. Je suis très heureux de cette
initiative. Les frais de procédures continuent à tomber. J’ai entrepris
auprès de Clearstream une démarche pacifiante. Je sais qu’à long terme, à
coups de procès, d’appels et de pourvois, ils sont les plus forts. Ça ne me
dérange pas d’être le plus faible. Ce qui me dérange c’est le temps et
l’énergie que ça me prend. Et cette solitude face à l’adversité. Les Chinois
disent que pour lutter contre ce qui est dur et fort, il faut être souple et
liquide. Je vais boire un coup à notre santé. Tout va bien puisque nous
sommes vivants. Et eux déjà morts.
DR (2 mars)