27.6.07


Je vous écris d'une chaise longue. Ce n'est pas franchement les vacances pourtant... J'ai une sorte de fracture du col du fémur. Le toubib a décrété que j'avais eu trop de choses à porter ces derniers temps. Je laisse dire. Le moral est bon même si les embrouilles continuent. Je viens de recevoir les nouvelles conclusions de Clearstream pour le procès qu'ils me font à Luxembourg suite à "Clearstream, l'enquête". C'est très difficile de lutter contre des adversaires si fortnués et d'une telle mauvaise foi. Je m'y atèle. Ils me réclament 100 000 euros dans un pays où je doute de l'impartialité de ses magistrats. D'où la nécessité, encore et toujours, de soutenir les initiatives de mes potes du comité. Le 2 juillet prochain, mon ami Florian Bourges est convoqué au TGI de Paris pour y être entendu par un juge d'instruction luxembourgeois dans l'affaire du corbeau. On lui reproche d'avoir livré des documents appartenant à son employeur, la société d'audit Arthur Andersen. Peu importe que ces documents prouvent que Clearstream a ouvert des milliers de comptes dans les paradis fiscaux ou a multiplié les pannes informatiques inexplicables. Ce qui compte pour cette multinationale et le pays qui la protège est de faire payer un témoin ayant eu le courage et l'honnêteté de livrer des documents confidentiels visant à informer les citoyens. Selon le site Boursorama, Clearstream a vu le nombre de ses transactions augmenter de 2% par rapport à mai dernier et de 15% sur le montant des valeurs conservées dans ses coffres. On frise les 11 trillions d'euros... La France et son appareil judiciaire sont aujourd'hui complices de cette basse manoeuvre. Une fois de plus, le Luxembourg est beaucoup plus rapide pour chercher des noises à ceux qui, à leur manière, luttent contre le crime organisé, que pour lutter contre ces criminels en col blanc... Passons... Florian et moi sommes placés sous contrôle judiciaire dans le cadre de l'instruction des juges d'Huy et Pons. Nous n'avons pas le droit de nous voir et de nous parler. Qu'il sache que je penserai à lui mardi prochain...
Nous
n'avons rien à regretter, rien à nous reprocher. Eux si.

DR

15.6.07

Denis Robert... ou le prix de la solution
le 13 juin 2007

Pourquoi le journaliste Denis Robert détient-il, aujourd’hui, le record
toutes catégories des plaintes pour diffamation ? Pourquoi, dès qu’il ouvre
la bouche pour une interview, dès qu’il prononce le mot maudit,
« Clearstream », pourquoi cette seule évocation se matérialise-t-elle, le
mois suivant, par une visite d’huissier ?

Parce qu’il dénonce le cœur de la planète financière ? A peine. Parce qu’il
porte une bonne nouvelle, surtout : la planète financière est régulable...

Denis Robert démontre, certes, que des centaines de banques off-shore,
situées aux Bermudes, aux Bahamas, à Jersey, dans une quarantaine de paradis
fiscaux, possèdent leurs compte chez Clearstream. Il ajoute que,
contrairement au règlement de la firme luxembourgeoise, des sociétés
privées, des multinationales, et non seulement des banques, sont présentes
dans les listings de Clearstream. Il révèle, enfin, et l’ancien responsable
informatique de Clearstream le confirme, que des transactions ont été
quotidiennement effacées de la mémoire des ordinateurs, afin de rendre
certains échanges plus opaques encore. Autant d’éléments qui, à l’évidence,
peuvent faciliter le blanchiment, voire le noircissement d’argent.

Mais tout cela n’est rien. Le capitalisme s’est habitué aux vaines
dénonciations, aux déplorations impuissantes. De rares films, plus
fréquemment des livres, se sont attaqués à Total, à la CIA, à Pinault
Arnault, aux hypermarchés, à la corruption des élus, etc., et qu’ont récolté
leurs auteurs ? L’indifférence le plus souvent, un succès d’estime ou de
librairie parfois, un procès à la rigueur lorsqu’ils avaient blessé
l’orgueil d’un de ces maîtres. Jamais, en tout cas, une pluie de plaintes
comme celle qui, depuis cinq années, s’abat sur Denis Robert.

Ce ne sont pas ses dénonciations, en vérité, que paie Denis Robert, pas même
certaines erreurs sur des points de détails. Non : il paie pour la solution.
C’est sans doute le message le plus dangereux, le plus explosif, le plus
subversif qui découle de ses ouvrages : la planète financière est régulable.
Facilement, même, peut-être...

[Intertitre] Une tour de contrôle de la finance

Qu’on s’explique : lorsque deux banques, l’une au Japon par exemple, l’autre
en France, doivent échanger des valeurs entre elles, elles passent par
Clearstream (ou par Euroclear, à Bruxelles). On appelle ça des « chambres de
compensation ». Autant dire que les plus gros flux, des centaines de
milliards d’euros transitent chaque jour par ces autoroutes de la finance.
Le système, que l’on croyait totalement éclaté, décentralisé, et donc
incontrôlable, se révèle au contraire hyper-centralisé, et donc parfaitement
observable. Donc contrôlable.

Clearstream sert aujourd’hui à décupler la spéculation, et éventuellement à
dissimuler les fruits de divers trafics. Cette « banque des banques »
pourrait tout aussi bien, demain, devenir une tour de contrôle de la finance
globalisée. Le gendarme d’un monde sans loi. A condition que cet
établissement soit transformé en organisme international, ou que des
instances indépendantes le surveillent de près.

Voilà ce qu’il ne faut surtout pas comprendre.

Alors, pour qu’on ne comprenne pas cela, on nous embrouille avec de la
technique financière ou des « corbeaux ». Les avocats de la firme
poursuivent, menacent, chipotent sur des vétilles. Toute cette fumée
médiatico-judiciaire pour que l’on n’aperçoive pas, clairement, la bonne
nouvelle, la lumière au fond du tunnel : la mondialisation financière peut
être régulée. Encore faut-il le vouloir...

+ L'émission "Là-bas si j'y suis" de Daniel Mermet du 14 juin (France Inter, à écouter en podcast*)
>cliquez ici

*Podcast, le lien RSS : il vous suffit de copier ce lien et de le coller dans votre application podcast. http://radiofrance-podcast.net/podcast/rss_14288.xml

9.6.07

One day in Luxembourg

Mardi matin donc, à la demande ferme de mon excellente avocate à Luxembourg,
je me suis rendu à la Cour d'appel du Grand Duché où trois magistrats, un
avocat général et quelques hommes et femmes en robe devaient disserter avec
nous (mon ami réalisateur Pascal Lorent et moi) pour savoir si oui ou non,
il fallait nous envoyer en correctionnel pour avoir eu l'outrecuidance
d'expliquer en 2001 que la BCCI (alias la banque du crime et de la
corruption) avait transféré illégalement 15 millions d'euros à la Banque
générale de Luxembourg (la banque de la famille royale grand ducale), via
Clearstream. Je ne vais pas revenir sur le fond de ce dossier qui encombre
ma boîte aux lettres depuis six ans... Il faut bien qu'ils me coincent par
un bout... Mon avocate avait à juste titre plaidé la prescription dans la
mesure où aucun acte judiciaire n'avait été diligenté pendant 17 mois...
Dans ce dossier, j'ai aujourd'hui surtout comme adversaire farouche le
représentant de l'Etat luxembourgeois qui, aidé de l'avocat de la BGL,
essaie de transformer un délit de presse en un délit de droit commun (où les
délais de prescription sont plus longs). Il semblerait que pour le livre,
cette acrobatie judiciaire soit trop alambiquée. Pour le film, ce serait, si
j'ai bien compris différent. Les dissimulateurs ayant été diffusé en 2001
et la loi intégrant l'audiovisuel dans les délits de presse au Luxembourg
ayant été promulgué en 2004, la prescription pourrait ne pas s'appliquer...
Je sais que ces développements intéressent peu de monde mais vous êtes
nombreux à me demander des explications concrètes sur ce qui m'arrive...
Donc ce qui m'arrive c'est cela... Des discussions à n'en plus finir, des
combats d'arrière-boutique qui font oublier l'essentiel (le virement a bien
existé entre BCCI et BGL via Clearstream), la volonté farouche et vengeresse
des représentants de l'Etat luxembourgeois de me faire payer ce qu'ils
considèrent comme des excès de langage... Le représentant du parquet n'avait
ce mardi-là pas rendu ses conclusions par écrit... La Cour a renvoyé les
plaidoiries au 9 octobre prochain... C'était une journée perdue. Une de
plus. Elle participe au harcèlement général. Elle m'a permis d'utiliser mon
nouveau GPS et de ne pas me perdre dans les rues de Luxembourg...
Une de mes amies a récemment comparé les plaintes déposées contre mes livres
et mes films à des épines. Il faudrait patiemment que je les enlève une à
une... J'en avais environ 90, il m'en reste 27. S'ils retiennent la
prescription dans le dossier BGL-révélation$, il en restera 26. On se
console comme on peut face à des adversaires qui sont des multinationales,
des banques et des pays.

DR

8.6.07

La vidéo d'Erwinact, à voir absolument...


Appel aux Journalistes et/ou Auteurs
Vidéo envoyée par erwinact

1.6.07



Bientôt mille…

Sur le blog voisin où les journalistes peuvent scanner leurs cartes de presse pour dire leur soutien, la barre des 200 envois vient d’être dépassée. Ce n’était pas mon initiative et pour tout dire, je l’ai vue se lancer avec un peu d’inquiétude. Au delà des visages et des personnes, ce qui me frappe c’est la multiplicité des sources et des générations. De vingt à quatre vingt piges, De TF1 à la presse d’entreprises, des sites internet à l’AFP, de Télérama à la PQR, le spectre est de plus en plus large. Je n’ai plus de carte de presse depuis douze ans. Je ne m’en porte ni plus mal, ni mieux. Elle ne m’a jamais servi à grand chose, mais je me souviens de ma fierté le premier jour où on me l’a envoyée. Il y avait quelque chose de l’ordre du sacerdoce, de la mission, de l’entrée dans une famille disparate à l’histoire longue et mouvementée. Le jour où je l’ai reçue, je me suis dit qu’Albert Londres avait eu la même. Et puis évidemment, les choses se sont gâtées. J’ai vite compris qu’au quotidien, le boulot était différent de ce que j’avais imaginé. J’ai croisé tellement de crétins, de pleutres, de frimeurs, de starlettes, de communicants, de fausses valeurs, de traîtres dans cette profession que j’aurais pu en être dégoûté. C’est ce qui m’est arrivé. J’ai quitté le circuit de la presse salariée. Ceux qui me connaissent mal peuvent penser que mon parcours, entre essais, romans et travail d’auteur est depuis ce jour sinueux. J’ai toujours agi au feeling, sans calcul à long terme. J’ai toujours su que j’étais d’abord écrivain. C’est inscrit dans mon code génétique. Ecrire, transmettre, faire passer.
Ce qui doit être jugé dans l’affaire qui nous concerne, c’est l’information. Est-elle menacée ? Si oui, la démocratie l’est forcément.
Mon combat dans le maelström Clearstream est devenu un symbole. C’est difficile à admettre mais c’est ainsi. Si je perds, vous perdez…
Les citoyens perdent. Et les journalistes aussi.
A ceux qui me pensent que je pourrais me servir de cette situation ou qui jugent que j’ai été trop léger ou trop provocant –j’ai tout lu et entendu à ce propos, je voudrais rappeler que je ne suis pas l’agresseur. Je n’ai fait que révéler un immense scandale en 2001. Celui des chemins de l’argent caché et du crime financier. Depuis, je ne fais que me défendre et parer au plus pressé. On ne gère pas 27 procès tous plus iniques les uns que les autres comme on gère un plan média, on est obligé d’être inventif et pédago. On est obligé de se réveiller chaque matin ens e disant qu’on ne rêve pas.
Si je me tais aujourd’hui (c’est ce qui est recherché par mes adversaires), les événements s’apaiseront peut être. Nous serons alors en 2013. Ce qui se joue dépasse ici largement ma personne. Les informations les plus gênantes et les plus belles sont celles qui résistent au temps et aux attaques. C’est ce qui est en train d’arriver. Je résiste. Nous résistons. Ils attaquent, trop sûrs d’eux. De leur puissance.
Les révélations qui sont dans mes films et mes livres sont-elles fiables, originales, recoupées ? Font-elles découvrir un monde inexploré ? Eclairent-elles sur la manière dont les pouvoirs s’installent, perdurent, corrompent ? Si à ces questions la réponse est oui, comment expliquer qu’un appareil judiciaire me mettent en examen et me poursuivent avec une telle assiduité ? Etre journaliste ou plus généralement auteur et accepter cette censure, c’est regarder sombrer la démocratie sans broncher. C’est l’enjeu de la campagne lancée par mes amis. Pour une fois qu’une carte de presse sert à autre chose qu’à obtenir une réduction sur le prix d’entrée d’un musée…

DR

http://jesoutiens.blogspot.com/