La perversité du monde - Denis Robert- 06/04/06

La publication d'une des fins que j'avais imaginées pour clore mon roman afait beaucoup réagir. Plusieurs internautes, en particulier les initiés à ces histoires de corbeau, des français mais aussi des Luxembourgeois, ont cru lire une sorte d'outing de ma part. Comme si je confessais, via la fiction, avoir une quelconque responsabilité dans ces envois de lettres ducorbeau. Je souris. En même temps, je m'inquiète. Il semble qu'au plus haut niveau de l'Etat, tout le monde soit nerveux et attentif à mes faits et gestes.

Donc, je précise: cette seconde fin était une fiction totale, une invention.

Mon roman, la domination du monde, qu'ils ont lu (ce dont je les remercie), s'inspire de faits réels. J'y ai traqué une certaine forme de vérité que j'ai romancée. J'ai imaginé ce qui s'était peut être passé compte tenu de ce que j'avais vécu.

J'évolue dans deux mondes parallèles. D'un côté l'évidence des faits prouvés, de l'autre la fiction, la perception d'une réalité globale que je reconstruis.

Je ne me trompe jamais de territoires.

Lorsque j'écris des essais ou des récits d'enquête, je prouve ce que j'avance. C'était le cas de Révélation$ et de la boîte noire.

Lorsque j'écris des romans, je demande à mes lecteurs de partager mesconvictions. Et je fonce.

Suivant à la trace les agissements des acteurs de la saga Clearstream depuis cinq ans, j'ai été en contact avec un grand nombre de gens qui avaient un intérêt pour le clearing et des informations à me livrer ou à me voler sur cette banque des banques qui fait régulièrement la une des pages financières et des faits divers (cf l'article du Canard).

Je n'ai publié qu'une partie des informations recueillies, parce qu'il yavait de l'invérifiable, du faux, et parfois du vrai qui doit encore mûrir. Ainsi, comme j'étais aux premières loges, j'ai su parmi les premiers que les services secrets français, ou plus précisément certains agents, avaient maille à partir avec le corbeau et qu'une manipulation complexe était à l'origine des missives.

Je n'ai jamais eu de goût pour le bain saumâtre dans lequel pataugent allègrement les barbouzes, les maîtres chanteurs, les politiques paranos et les vendeurs d'armes. En même temps j'ai constaté que le corbeau et sa bande connaissaient parfaitement le fonctionnement de la Clearstream Company. Et qu'une partie de ce qu'il dénonçait tenait la route... Le corbeau est unvrai héros de roman.

Mon but reste d'écrire des livres ou parfois de faire des films. Des barrages, comme le dit le psychanalyste de mon roman. A l'évidence un livre sortira de ces nouvelles aventures. En attendant, je viens de découvrir que les "services" n'oeuvrent pas vraiment pour la sauvegarde de notre démocratie. Les vilains. Et ne comprennent rien à la littérature. Lespauvres.

DR